Bâtir à Genève: possible?

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Genève s’est engagé, en 2007, dans le cadre du Grand Genève, à construire 2000 logements par an. La politique des zones de développement. dont Antonio Hodgers a évoqué le 60e anniversaire, le 22 juin dans cette page, ne règle de loin pas tous les problèmes. Comment construire des quartiers où il fait bon vivre sans vider les poches des locataires et de l’État.

L’aménagement des grands périmètres mixant habitat et activités est une opportunité à saisir pour combattre la pénurie de logements et remédier aux nuisances ainsi qu’à la pollution en réduisant les trajets entre lieu de domicile et de travail. Encore faut-il l’envisager de façon à créer l’adhésion.

Le rôle du promoteur-constructeur est de définir dès l’origine du projet les objectifs attendus pour les espaces publics, la mobilité, les gabarits des constructions et le cadre paysager. Ce processus doit se faire en concertation, notamment avec la collectivité qui accueillera les nouveaux habitants.

Chaque projet immobilier est unique et doit s’inscrire avec pertinence dans son contexte en s’appuyant sur la créativité des architectes afin qu’il offre un habitat correspondant aux attentes de ses futurs habitants. Le projet se construit avec les acteurs essentiels de la société civile et des pouvoirs publics: autorités politiques, associations, experts, habitants et riverains, le pilote du projet jouant le rôle de chef d’orchestre.

Construire durablement et harmonieusement doit remplacer la logique du construire vite au plus bas prix.

Avoir un toit fait partie des besoins fondamentaux, pouvoir profiter pleinement d’un environnement de qualité comme cadre de vie est une attente légitime. Le projet immobilier ne se résume pas à une équation financière dans laquelle seraient sacrifiés la qualité de vie et le bien-être.

L’enjeu principal de la création de logements où il fait bon vivre est à rechercher avant tout dans une vision urbanistique dès la planification. Les concours favorisent l’émergence de propositions originales de la part des architectes-urbanistes et permettent une réflexion en amont tenant compte des spécificités du site et de l’implémentation du projet dans le patrimoine bâti et paysager existant. Il faut en finir avec les «barres d’immeubles» sans âme. De même, la mixité des types de logements est fondamentale pour répondre à la demande diversifiée des habitants.

La zone de développement doit favoriser les logements pour la classe moyenne, que ce soit du locatif ou de la propriété par étage à prix contrôlés. Faute d’offres suffisantes, trop peu de nos concitoyens ont conscience que les prix des PPE y sont extrêmement abordables. La recherche de solutions pour le relogement des propriétaires de villas contribue à débloquer maintes situations, sans avoir à recourir à l’expropriation qui risque de créer un climat de méfiance. Il en va de même avec la tentation de préempter.

Le pacte social exprimé par le Conseil d’État lors du discours de St-Pierre pourra ainsi déployer ses effets en combinant les forces des acteurs privés et publics. C’est dans cet esprit que l’aménagement de Genève pourra se réaliser sereinement, afin d’offrir des logements pour toutes les catégories de la population, où l’intervention de l’État ne serait envisagée qu’en cas de blocage avéré. La création d’une «machine à construire» où la prépondérance de l’État serait trop forte est un risque à éviter.

Thomas Mader
président de l’Association des promoteurs et constructeurs genevois

Télécharger la chronique parue dans la Tribune de Genève